À propos —
Exposition collective d’artistes autochtones
Chaque hiver, de glaciales volutes s’élèvent des courants sinueux de la rivière Outaragasipi devant le lumineux Musée d’art de Joliette. Cette saison, un chaleureux campement d’œuvres d’art autochtone contemporain prend place à l’intérieur du bâtiment. Leurs formes émerveillent, donnent à rêver aux odeurs de tabac et de foin d’odeur, à voir des esprits visuels colorés, à écouter des ondes sonores. Leurs récits imagés sourdent, eux aussi, du Nitaskinan, le territoire.
Avec l’exposition collective De tabac et de foin d’odeur. Là où sont nos rêves, le musée vibre d’étonnants dispositifs artistiques autochtones, nomades en quelque sorte, oscillant entre matérialité et énergies invisibles, esthétique et éthique, à l’intérieur et à l’extérieur du musée. Cette vision autochtone vise un nécessaire ré-ensauvagement de nos rapports au monde et invite au renouvellement des relations mutuelles. S’agirait-il ici de changer nos visions du monde?
Les artistes Eruoma Awashish, Jacques Newashish, Catherine Boivin et Terry Randy Awashish (Atikamekw) se joignent à Christine Sioui Wawanoloath (Waban A’kis), ainsi qu’à Hannah Claus (Kanienke’a:ka) et à Sonia Robertson (PekuakamIlnuatsh). Caroline Monnet (Anishinabe) présente une oeuvre en duo avec Daniel Watchorn et une deuxième avec Ludovic Boney (Wendat), produite par l’Office national du film du Canada. Le commissaire Guy Sioui Durand (Wendat) signe ce campement imaginaire dont les racines sont anciennes certes, mais engagent l’avenir.
Plusieurs œuvres seront exposées dans des endroits inhabituels, au Musée et dans la ville.
Dimanche 28 avril • de 14 h à 17 h
Finissage de l’exposition
En guise d’au revoir à cette exposition hors norme, le MAJ vous convie à une visite guidée d’une heure avec le commissaire Guy Sioui Durand (Wendat) et à une performance du duo formé des artistes Catherine Boivin et Terry Randy Awashish (Atikamekw).
Entrevue avec Eruoma Awashish
Pour voir d’autres entrevues d’artistes réalisées par le MAJ, c’est par ici!
Œuvres à la une :
Ludovic Boney et Caroline Monnet, Hydro, installation multimédia, 72 x 96 po. Photo : Romain Guilbault, 2019.
© Office national du film du Canada, 2016.
© Hannah Claus. Water song, vue de l’exposition, Musée d’art de Joliette, 2019. Photo : Romain Guilbault.
© Sonia Robertson, Le sang de la terre-mère, vue de l’exposition, Musée d’art de Joliette, 2019. Photo : Romain Guilbault.
© Jacques Newashish, Nikastinan, vue de l’exposition, Musée d’art de Joliette, 2019. Photo : Romain Guilbault.
Organisme partenaire de l’exposition : Collectif des commissaires autochtones
Cette exposition collective est réalisée grâce au soutien financier de la bourse Nouveau Chapitre du Conseil des arts du Canada, en collaboration avec l’Office national du film du Canada.
Merci à nos précieux partenaires, le Centre d’amitié autochtone de Lanaudière et son programme Waskapitan, ainsi que le Ciné-répertoire de Lanaudière et Kiwimédia.
Mot du commissaire
De glaciales volutes s’élèvent des courants sinueux de la rivière Outaragasipi devant le Musée d’art de Joliette. On dirait que leurs eaux pétunent, qu’elles fument le tabac et le foin d’odeur. Cette fumée d’hiver nous emmène là où sont nos rêves.
Au Musée, un inouï rassemblement d’attracteurs esthétiques s’y font capteurs de songes. Ceux-ci rendent visibles des énergies insoumises en images, objets cérémoniels, courts métrages, sculptures-installations, peintures, photographies et performances nomades. Cet art autochtone a comme dénominateur commun la fluidité emmêlant la fumée chaude du tabac à celle glaciale de l’eau vive. L’imagination déborde dans la ville. Elle occupe les six directions, ajoutant aux points cardinaux cette part de sacré qui s’ancre dans la Terre-Mère et qui relie au monde céleste des Okis, ces esprits protecteurs.
Les œuvres font échos artistiques aux énergies chamaniques du tabac cérémoniel, des trois tambours – innu, atikamekw et wendat – et à l’omoplate de chevreuil suspendus dans le hall au-dessus de nos têtes. L’artiste waban a’kis et wendat Christine Sioui Wawanoloath nous happe dans cet univers avec sa grande illustration, Là où sont nos rêves, dès le mur vitré de l’entrée. Sa seconde œuvre, Esprit du rêve, nous guide vers la salle d’exposition.
Là, deux installations fluides et aériennes ondulent et scintillent. Le sang de la Terre-Mère par Sonia Robertson de Mashteuiatsh noue la guérison de l’eau des rivières aux vœux des femmes des Centres d’amitié autochtone de Lanaudière et de Val-d’Or. La seconde est inspirée d’une mélodie composée par une femme atikamekw et inscrite dans la série water song [chant pour l’eau] de l’artiste kanien’kehá:ka Hannah Claus. De plus, la toile d’une tente de prospecteur tendue sur des perches coupées dans le territoire rend nomade les entre-deux-mondes de Jacques Newashish. L’œuvre transporte la vie des forêts dans le cube blanc. Fière rebelle, sa complice atikamekw Eruoma Awashish met les jeunes générations de l’avant avec Poings levés vers l’avenir. Visible du dehors, sa murale du nom de sa fille, Onimiskiw, a été créée in situ dans la vitrine du Musée.
L’installation-choc Hydro, du tandem composé des artistes anishinabe Caroline Monnet et wendat Ludovic Boney, est plongée dans la pénombre. Elle renverse notre expérience domestique des technologies de câblage, d’enregistrement et d’éclairage qui sont dépendantes des barrages, réservoirs, inondations et déplacements en réserve vécus par les Eeyou Istchee, Algonquins et Atikamekw. L’inquiétant court métrage de Caroline Monnet et Daniel Watchorn sur les pensionnats autochtones inséré dans l’exposition permanente du Musée sous le thème du sacré, la sélection vidéo de Catherine Boivin, les douze photographies féministes du projet pancanadien Résilience affichées sur des panneaux publicitaires dans la ville de Joliette et, lors d’un finissage festif, la performance des artistes émergents Catherine Boivin et Terry Randy Awashish, transforment cette exposition en événement.
Voilà ma vision de Wendat. Entre esthétique et éthique, étonnements et émerveillements, je vise un ré-ensauvagement de nos rapports au monde et j’invite au renouvellement des relations mutuelles. Ce campement imaginaire possède des racines anciennes qui engagent l’avenir.
Guy Sioui Durand, commissaire invité
Biographie —
Wendat (Huron) originaire de Wendake, Guy Sioui Durand est membre du clan du Loup. Docteur en sociologie, critique d’art, commissaire indépendant, conférencier de renom et performeur, Sioui crée aussi des harangues performées exprimant l’oralité amérindienne. L’art actuel et l’art amérindien sont ses domaines d’intervention. À l’hiver 2019, il donne le cours Art autochtone moderne et contemporain à l’Institution Kiuna à Odanak et au département d’histoire de l’art de l’UQAM à Montréal.
Sioui Durand est l’auteur de livres, dont L’Esprit des objets (2013), Riopelle. Indianité (2002), Les très riches heures de Riopelle (2000) et de l’ouvrage de référence L’art comme alternative. Réseaux et pratiques d’art parallèle au Québec (1997). Trois livres sont en chantiers : Ohrehta’. Art Sauvage en Kébeq et Kanata, L’art, sans alternative. Art actuel du Québec au Monde, tome 2 et Sehiatonhchotrahk. Écrits littéraires. II signe aussi plusieurs essais comme critique d’art publiés dans des catalogues, périodiques ou des revues spécialisées en ligne.