À propos —
Depuis les années 1990, l’art vidéo de Mark Lewis explore le langage cinématographique et les mécanismes de construction des images. Ses films présentent un récit minimal qui est souvent prétexte à l’exploration d’une technique de captation vidéo. Si le son est absent, c’est pour que l’attention du spectateur soit entièrement consacrée à ce qui lui est donné à voir. Les « tableaux en mouvements » que crée l’artiste invitent à s’immerger dans une scène précise pour mieux en observer les détails. Le rythme de défilement des images, souvent en léger décalage avec la réalité, crée une temporalité incertaine où le mouvement des personnages et les scènes réelles semblent suspendus dans le temps.
Le titre qui unit les deux œuvres de Lewis présentées cette saison au MAJ est un clin d’œil à la fin du récit dans la tradition du cinéma français, mais surtout à l’achèvement de moments historiques. Londres (près de la mort), nous plonge dans une histoire récente, qui marque la fin du long règne de la reine Élizabeth II. La scène captée se déroule aux abords du Buckingham Palace, dans les jours suivant la mort de la souveraine. L’œuvre ne présente pas de récit, mais nous plonge plutôt dans un instant précis : celui de l’attente des directives aux médias. Dans un long traveling, la caméra parcourt les tentes et la horde de journalistes postés aux abords d’un terrain bordé de fleurs, rythmé par les drapeaux britanniques. Cette tapisserie répétitive, à la fois irréelle et ordinaire, débouche finalement sur une foule désorganisée et incertaine, elle aussi en attente de la suite de l’histoire.
De la Casa do Povo à l’Art Palacio fait également écho à la question du temps, autant par son sujet que par la technique utilisée. Des milliers d’images fixes recréent, en trois dimensions, un segment du centre-ville de São Paulo au Brésil. Le parcours sillonne les rues entre deux monuments culturels représentatifs de l’époque moderniste : la Casa do Povo et l’Art Palacio, un cinéma aujourd’hui laissé à l’abandon. Les parties manquantes et les déformations du collage numérique offrent un rendu imparfait de l’espace. Tout semble se désagréger, donnant un aspect fantomatique à celle autrefois considérée comme la « ville du futur ». Alors que le passé s’efface peu à peu, l’œuvre agit comme mémoire du lieu et de l’histoire de son architecture
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Biographie —
Mark Lewis a représenté le Canada à la Biennale de Venise en 2009. Ses œuvres sont collectionnées par les plus grands musées du monde et ont fait l’objet d’expositions individuelles et collectives : Centre Pompidou, Paris; MOMA, New York, Musée du Louvre, Paris ; Musée d’Israël, Israël; Modern Art Oxford; Taipei Fine Arts Museum, Taïwan; Musée d’art contemporain du Luxembourg; Galerie d’art de l’Ontario, Toronto; The Contemporary Austin, Texas; Musée des Beaux-Arts du Canada; MASP, Sao Paulo; et dans de nombreuses autres institutions. Il a écrit et publié plus de 30 essais dans différents journaux et ouvrages critiques. Son livre sur un film de l’artiste Pierre Huyghe a été publié en 2021 chez Afterall Books et il est distribué par MIT Press. Lewis a reçu le prix du Gouverneur général en arts médiatiques en 2016 et le Prix Gershon Iskowitz de l’AGO en 2010.
Images à la une :
© Mark Lewis, From Casa do Povo to Art Palacio, 2019. Avec l’aimable permission de l’artiste et de la Daniel Faria Gallery. Photo : Maryse Boyce
© Mark Lewis, From Casa do Povo to Art Palacio, 2019. Avec l’aimable permission de l’artiste et de la Daniel Faria Gallery
© Mark Lewis, London (Near Death), 2022. Avec l’aimable permission de l’artiste et de la Daniel Faria Gallery